Phở bò

Publié le 4 février 2025 à 07:23

Difficulté : intermédiaire - préparation longue

Quantités : pour 8 personnes


Le phở (prononcer "feu" avec une intonation descendante) est le plat le plus emblématique du Vietnam. C'est le plat national, il a sa journée consacrée et il est souvent repris et réadapté par ses voisins que sont le Cambodge, la Thaïlande et le Laos.

Et pour je ne sais quel raison, alors que j'écrivais cette recette, une floppée d'articles parlent de la nouvelle sensation qu'est le phở en France, qui débarque et qui s'installe partout dans l'Hexagone. Pourtant, j'avais bien l'impression qu'il était déjà confortablement installé, au moins à Paris, il y a 10 a 15 ans, et que tout le monde ne jurait que par ça. Que voulez-vous, les modes culinaires c'est comme une chanson de Claude François, ça s'en va et ça revient.

 

Les origines du plat sont plutôt floues. On dit souvent qu'il est issu du pot au feu français, les colons amenant leurs habitudes alimentaires, et le terme "phở" rapprochant les noms des deux plats. C'est probablement faux (eheh), en tout cas en grosse partie. Des bouillons aux herbes avec de la viande de bœuf et des nouilles de riz sont avérés avant la colonisation française. Certains spécialistes évoquent le fait que l'habitude française de manger du bœuf bien plus régulièrement aurait rendu certains morceaux plus accessibles aux locaux, notamment les os pour faire des bouillons, et par là favorisé la popularité du plat.

 

Le nom est très probablement issu des travailleurs chinois et du cantonnais "ngàuh yuhk fán", "viande de bœuf et nouilles", avant d'être simplifié en "yuhk fán", "viande et nouilles", déformé par la langue vietnamienne en "nhục phấn" en allongeant la dernière syllabe puis en perdant le "n" pour éviter l'association avec le mot chinois "phẩn" pour "excréments". On comprendra aisément le changement...En 1917 un auteur vietnamien parle déjà de "nhục-phở" et en 1919 un auteur français de "yoc feu".

 

Comme le bành mi, le phở est un plat du Nord du Vietnam qui s'est diffusé à l'ensemble du pays à la suite de la guerre contre la France puis les États-Unis, et les flux de population qui en ont découlé. Autre point commun, on parle de "bành phở" pour désigner les larges nouilles de riz caractéristiques qui accompagnent la viande. Pour vous dire à quel point le terme "bành" se traduit bien mieux par "produit à base de farine" que comme "pain" ou "gâteau".

 

La base du phở, c'est véritablement la viande et les nouilles. Les oignons arrivent un peu après, et les piments, pousses de "soja", citron vert, herbes aromatiques, boulettes, viande crue et autres n'arrivent que vraiment plus tard avec la diffusion du plat. On peut citer l'ail confit dans la cuisine du Nord et qui, à en croire la recette de la mère d'un collègue, se retrouve aussi dans la cuisine cambodgienne.

 

Une version avec uniquement la viande et l'ail confit

 

Comme la viande de bœuf n'était pas disponible certains jours, des phở au poulet étaient servis dans les établissements dédiés et ils sont toujours assez en vogue, même si la base du phở est avant tout le "bò", le bœuf. Ma version favorite est la plus généreuse qui utilise la viande en trois versions, à savoir le boeuf bouilli, les boulettes et les tranches crues, cuites par le bouillon brûlant. Pour les herbes aussi j'aime, quand c'est possible, être généreux en y mettant autant de coriandre longue que de menthe et de coriandre, sans oublier les oignons verts. Mais ce sont des habitudes du Sud et les versions du Nord sont plus sobres. Il existe en vérité un nombre assez important de variantes, certaines étant même de simples nouilles sautées au boeuf sans bouillon comme le Phở xào. On peut faire le lien avec le saimin hawaïen et sa version de nouilles sautées.

 

Ici on va faire la version plus riche et traditionelle du Sud et le plus important dans ce plat, au même titre que les ramens japonais dont le principe est assez proche, c'est le bouillon. C'est ce qui rend cette recette aussi longue à préparer et aussi fastidieuse qu'absolument délicieuse. 

Et c'est optionnel, mais certaines habitudes régionales accompagnent le phò de sauce hoisin, sriracha voir dans un autre registre de riz ou, plus souvent, de bánh tiêu, un beignet non sucré creux qu'on trempe comme du pain dans la soupe. Pour le coup, sur ce point précis et sans certitudes, je ne peux m'empêcher d'y voir une amusante influence française, mais allez savoir.

Bon, encore une fois à part le bœuf et les nouilles, tout est optionnel alors sentez vous libres d'ommettre ce que vous voulez.

Le plat servi avec à droite sur le côté du bol le fameux bánh tiêu

Ingrédients 

 

Pour le bouillon : 

  1. 1.5 kg d’os de bœuf avec un peu de moelle et/ou de chair.
  2. 1 kg de paleron de bœuf 
  3. 1 càs bombée de sucre de palme (ou de canne sinon)
  4. 200 ml de sauce poisson de bonne qualité
  5. 3 càs rases de sel
  6. 1 oignon
  7. Environ 100g de gingembre frais
  8. 1 tête d’ail
  9. 2 bâtons de cannelle
  10. 1 càs de graines de coriandre
  11. 1 càs de graines de fenouil
  12. 5 étoiles de badiane
  13. 5 gousses de cardamome noire (ou verte sinon)
  14. 10 clous de girofle


Pour le service (tout est optionnel) : 

  1. ½ oignon
  2. 1 poignée de pousses de haricots mungo (pousses de "soja")
  3. 4 cébettes
  4. 1 poignée de coriandre fraiche
  5. 8  grandes feuilles de coriandre longue (ngo gai)
  6. 1 à 2 gros piments asiatiques ou autres.
  7. 2 citrons verts
  8. Une coupelle de sauce sriracha
  9. Une coupelle de sauce hoisin
  10. 4 à 8 bành thieu
  11. 1 poignée de menthe
  12. 1 poignée de basilic thaï
  13. 1 paquet de boulettes asiatiques de tendons de boeufs
  14. 500 g de faux-filet
  15. 8 à 16 gousses d'ail confit (a acheter en magasin asiatique ou a faire en cuisson douce dans de l'huile neutre avec la peau)

Réalisation

Pour le bouillon : 

  1. La veille, commencer par blanchir les os. Faite bouillir de l'eau et les y plonger pendant une dizaine de minutes. Couper le feu, sortir les os, les nettoyer sous l'eau froide et les réserver avec leur chair bouillie. Jeter l'eau. 

  2. Préchauffer le four à 250 degrés en mode grill. Trancher en deux honrizontalement la tête d'ail de manière a voir chaque moitié des gousses. Trancher l'oignon de la même manière. Découper le gingembre en tranches d'environ 5mm.

  3. Placer les aromates découpés sur un plat, les os sur un autre plat en dessous ou â côté et mettre le tout au four pendant 15 minutes, ou jusqu'à ce que le gingembre noircisse un peu. On évite de mettre os et aromates dans le même plat pour que le gras relâché par les os n'humidifie pas trop les aromates en les empêchant de brunir. Réserver le tout.

  4. Faire chauffer une grande marmite à feu vif et y faire dorer le paleron de bœuf. Réserver la viande et déglacer les sucs à l'eau. Baisser à feu doux et y mettre les aromates et les os sans oublier leur gras. Remettre la viande. Recouvrir généreusement d'eau.

  5. Dans une étamine ou un filtre a café robuste, mettre les épices entières et les plonger dans le bouillon. Couvrir.

  6. Au bout de 4 heures de cuisson ou lorsque la viande est suffisamment tendre, la sortir et la mettre au frigo et jeter aromates, os et épices.

  7. Ajouter au bouillon la sauce poisson et le sucre, bien mélanger et laisser refroidir. Conserver le bouillon au frigo pendant au moins toute une nuit. Saler le faux filet sur les deux côtés et le remettre au frigo dans un contenant fermé.

  8. Le jour de la réalisation du plat, sortir le faux-filet du frigo, le paleron cuit ainsi que le bouillon et retirer le gras figé en surface, en en conservant une petite partie dans le bouillon. Pour le reste, le garder dans un bocal comme base grasse pour d'autres cuissons.

  9. Plonger les boulettes de bœuf dans le bouillon et le faire chauffer à feu vif. Pendant qu'il chauffe, le goûter et, si il est trop corsé, le couper à l'eau.

  10. Pendant ce temps, découper le faux-filet en tranches d'environ 3 mm minimum. Plus fines, je trouve que le bouillon les cuit trop vite est qu'elles perdent leur tendreté. Découper de même le paleron en tranches.

  11. Une fois le bouillon bouillant, sortir et réserver les boulettes, y plonger les nouilles dans une passoire pour les cuire en remuant. Préparer de grands bols à côté ainsi que les ingrédients pour accompagner (effeuiller les herbes, découper le piment, etc).

  12. Placer les nouilles cuites dans chaque bol, y ajouter les tranches de viande, les boulettes, optionnellement du piment,  des herbes, des pousses de "soja", de l'ail confit. Verser le bouillon brûlant sur le tout et servir avec ou sans les sauces et en proposant éventuellement les accompagnements à côté.

 

 


Source : L'excellent travail de recherche et d'explication de Marc Winer. Je ne saurai trop vous conseiller d'aller visiter son site pour des recettes comme celle là.

Ajouter un commentaire

Commentaires

Il n'y a pas encore de commentaire.