Yassa Ganaar

Publié le 14 mars 2025 à 07:44

Difficulté : Plutôt facile

Réalisation : Assez longue

Quantités : Pour 4 personnes


Le Yassa, comme de nombreux plats d'Afrique sub-saharienne, a des origines difficiles à retracer. Les traditions orales, c'est toujours plus compliqué pour trouver les origines d'un plat que les sources écrites. Et déjà que c'est rarement simple de trouver des origines précises aux plats français récents...

 

En se basant uniquement sur les ingrédients, on peut potentiellement faire remonter l'origine du yassa assez loin dans le temps. Contrairement à de nombreux plats d'Afrique de l'Ouest comme le mafé ou le tiep bou djen, il n'utilise ni arachide, ni tomate ou dérivés et peut donc avoir été créé avant la découverte de l'Amérique et les échanges botaniques et zoologiques qui en ont découlés. En tout cas, il y a de bonnes chances qu'il ait été consommé avant la colonisation. 

 

Le commerce arabe répand le citrus auranticula, dont fait partie le citron vert, dans tout le bassin méditerranéen dès les Xème-XIème siècle. Les caravanes de marchands maghrébins traversent assez tôt le Sahara pour les échanges commerciaux avec l'Empire du Mali dont les "mansa", les rois, sont les plus riches dirigeants du monde aux XIIIème et XVIème siècle grâce à leurs fabuleuses ressources en or. Il est bien possible que la lime ait été introduite dans la région avant le XIVème siècle par le biais de ces échanges.

Une chose est sûre. Si les Portugais introduisent d'autres agrumes au XVIème siècle dont l'orange douce (on en parlait au sujet du portokalopita), Michel Andason, naturaliste français, évoque déjà une culture bien développée du citron vert dès 1725 au Sénégal.

 

Quant au riz, si on peut croire avec les images de distribution d'aides humanitaires qu'il est systématiquement importé en Afrique, il n'en est rien.

Il y a deux origines principale au riz. Oryza sativa, c'est le riz asiatique qu'on connait le plus et qui se décline en de très nombreuses variétés. La deuxième origine, oriza glaberrima, provient justement d'Afrique de l'Ouest et son aire de répartition s'étend du Sénégal jusqu'au Nigéria. Cette variété serait apparue au Nord du Mali, au niveau du Delta intérieur du fleuve Niger. On ne sait cependant pas si il était anciennement utilisé pour le yassa, qui peut aussi être traditionnellement accompagné de fonio. De plus, l'introduction toujours plus importante de riz asiatique depuis la colonisation, aux rendements supérieures, à fait fortement décliner la culture du riz africain. Aujourd'hui, ce riz aussi appelé riz de Casamance, reprend petit à petit une place d'importance. 

 

La Casamance, c'est justement le lieu d'origine du Yassa. D'abord un plat de poisson mariné et grillé, c'est aujourd'hui la version au poulet qui est la plus populaire. Certains disent que l'origine du nom se traduit par "frire" en diola, certains que ça veut dire "cuit avec des oignons". Comme je n'ai pas de traducteur sous la main, difficile de confirmer quoi que ce soit.Le yassa, c'est en tout cas la sauce d'oignons dorés et de restes de marinade qui accompagne la protéine. Pour celle au poulet, on parle de yassa au poulet ou "yassa ganaar" en wolof. Il faut donc aimer les oignons, mais aussi le citron. J'irai même jusqu'à dire qu'il faut aimer le piment et le goût du fumé qui équilibrent si bien les saveurs, mais ce n'est pas obligatoire. 

 

Oui parce que traditionnellement, le poulet (ou le poisson) est grillé au feu de bois avant de recuire plus ou moins brievement avec la sauce. C'est donc une bonne occasion pour essayer autre chose à votre prochain barbecue. Sinon, vous pouvez aussi juste frire le poulet à la poêle ou le griller au four, mais vous ne profiterez pas de ce goût fumé qui va si bien avec le reste.

À moins d'avoir de la fumée liquide, ou "liquid smoke". Cet ingrédient d'origine états-unienne n'a rien de traditionnel mais cette petite bouteille risque de vous changer la vie et de vous permettre d'essayer bien des plats qui vous étaient plus ou moins inaccessibles. Par contre, à part la commander sur internet, je saurai pas trop vous dire où ça se trouve. 

De haut en bas et de bas à gauche : Version avec légumes citronnés et poulet entier, version festive avec plus de légumes citronnés, version simple au poulet grillé avec olives et enfin version ragoût liquide avec olives, (sympa mais plus grand chose à voir avec le plat)

Pour la moutarde et les olives, si on les retrouve constamment aujourd'hui dans des plats de yassa, ils ne font à la base pas partie du tout de la recette. Pour la moutarde, c'est assurément une influence des colons français. Pour les olives, ça vient très probablement d'une influence maghrébinne relativement récente. Vous pouvez faire sans ces ingrédients ou avec, c'est au choix. Moi j'utilise toujours la moutarde pour mariner le poulet et pour éviter d'assécher la viande au four, un peu comme pour un bœuf Wellington. On est pas sensé sentir le goût de moutarde dans la sauce. Pour les olives, vous pouvez aussi les accompagner ou les remplacer (lors du service seulement) par des légumes marinés au citron comme des tomates, oignons, concombres, poivrons ou avec des œufs durs. Ça se fait pas mal lors d'occasions festives apparemment. 

Mais parfois, je trouve que rien ne vaut la simplicité.


Ingrédients

  • 4 cuisses de poulet ou 1 poulet entier
  • 8 oignons jaunes
  • 5 citrons verts
  • 1 piment oiseau frais ou 2 piments oiseau séchés
  • 1 piment antillais
  • 300g de riz africain, brisures de riz ou riz au jasmin
  • 450 ml d'eau
  • 2 feuilles de laurier
  • 2 oignons verts
  • 1 poivron vert
  • 1 poignée de persil
  • 1 càc de girofle
  • 2 càc de poivre
  • 1 càc de cumin
  • 2 càc de sel
  • (Optionnel) 2 càc de "liquid smoke"

Réalisation

La veille :

  • Éplucher et découper grossièrement les gousses de la tête d'ail.
  • Découper et épépiner le poivron vert. Réserver la moitié au frigo.
  • Découper grossièrement le persil
  • Tailler la partie la plus vert des oignons verts, réserver le reste.
  • Mixer l'ail, le persil, la partie verte des oignons, le ou les piments, les épices et la moitié du poivron pour obtenir le nokoss, l'assaisonnement.
  • Détailler le poulet en morceaux si besoin, le saler et entailler sa chair. Y faire penetrer le nokoss en l'enfonçant profondement et recouvrir avec le reste.
  • Presser 4 citrons verts et arroser le poulet avec le jus.
  • Ajouter 2 feuilles de laurier et laisser mariner 24h ou au moins toute la nuit.

Le jour même :

  • Préchauffer le four à 180 degrés Celsius ou préparer le barbecue.
  • Éplucher et émincer les oignons en demi rondelles fines. Les faire revenir à feu vif dans une marmite couverte dans de l'huile d'arachide ou autre huile neutre avec un fond d'eau et du sel.
  • Débarasser le poulet de sa marinade extérieure et le badigeonner avec la moutarde. Si au four, ajouter la fumée liquide, environ 6 gouttes par morceaux. Le faire cuire.
  • Retirer le couvercle, laisser les oignons accrocher au fond et dès qu'ils sont suffisamment colorés, déglacer avec toute la marinade du poulet, laurier inclus. Baisser à feu doux.
  • Ajouter les oignons verts en entier et le piment antillais. Tailler le poivron vert en brunoise et l'ajouter également.
  • Pendant ce temps, cuire le riz dans l'eau.
  • Une fois le poulet bien cuit et sa surface legerement carbonisée, le sortir du four et l'ajouter aux oignons en retirant le piment.
  • Servir le riz dans un plat surmonté par la sauce yassa, le poulet, le piment et le dernier citron vert coupé en morceaux.

Na rees ak diam

"Bon appétit" en wolof, probablement pas littéralement. 


Sources : Les recettes de Aistou Cuisine et de Africa Cuisine qui ont chacune de bons conseils et qui m'ont permis d'arriver à une recette qui me plait. Sans oublier mes souvenirs du yassa du petit resto africain à côté de chez moi.

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